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- Publication : 10 juin 2015
La gestion déléguée du transport urbain fait encore parler d’elle à Casablanca. Mohamed Sajid, président du Conseil de la ville, vient d’adresser une mise en demeure en bonne et due forme à M’dina Bus, lui enjoignant de se conformer au cahier des charges liant les deux parties. Cet avertissement serait un préalable à la révision du contrat de délégation. Un dossier qui doit être suivi de près par la SDL Casa Développement.
Bus déglingués, flotte vétuste, manque d’investissement… sont autant de griefs retenus contre M’dina Bus. En clair, il est reproché au délégataire du transport urbain de ne pas avoir respecté ses engagements, notamment en matière d’investissement. Sur un montant global de près de 1,3 milliard de DH stipulé par le contrat de gestion déléguée, M’dina Bus n’aurait réalisé que 47%. L’autorité délégante reproche également à l’entreprise de transport de n’avoir couvert qu’à hauteur de 68% le territoire de la métropole en 2005. Un taux qui a continué de chuter depuis … pour atteindre 45% il y a quelques années. Autrement dit: sur les 164 lignes sur lesquelles s’est engagé le délégataire contractuellement, à peine 66 sont opérationnelles aujourd’hui.
Autre grief et non des moindres: la flotte du délégataire ne dépasse pas les 600 bus. En vertu du contrat de délégation, 1.200 bus devaient être en circulation depuis 2014. La majorité du parc de bus est en mauvais état, par manque de maintenance. «L’âge moyen des véhicules est de 16 ans, alors que le contrat conclu avec l’autorité délégante stipule le renouvellement des bus tous les 7 ans», signale une source auprès du Conseil de la ville. Aujourd’hui, l’autorité délégante et son partenaire se rejettent la responsabilité sur l’application de la convention.
«Depuis 2004, nous demandons le respect des engagements pris en vertu du contrat de gestion déléguée, en vain», souligne un responsable auprès de M’dina Bus. Il s’agit notamment de la clause relative à l’exclusivité de l’exploitation qui n’est pas respectée. En fait, trois concessionnaires (Chennaoui, Rafahia et Luxe Transport) continuent d’exploiter des lignes commerciales à profit depuis 2009. Alors que les bus de M’dina Bus circulent sur des lignes dites «sociales». «Or, nous avons besoin d’un système de péréquation entre les lignes déficitaires et celles qui génèrent du profit», poursuit la même source. Avec ses bouchons, Casablanca manque cruellement de couloirs de bus. Le management de M’dina Bus précise qu’il sollicite depuis 2004 le tracé de ces couloirs, mais ce projet peine à voir le jour. En conséquence, le délégataire, qui s’est engagé à atteindre un débit de 950 clients/bus/jour, n’arrive aujourd’hui à assurer que 750 clients/bus/jour. «La vitesse commerciale est tellement lente qu’elle ne permet pas d’atteindre les objectifs tracés au départ», reconnaît M’dina Bus. Rappelons qu’une étude réalisée en 2012, en partenariat avec l’Autorité organisatrice des déplacements urbains (AODU), avait conclu que sur certains tronçons, la vitesse commerciale est de 2 km/h. Autrement dit, le bus va deux fois moins vite qu’un piéton dont la vitesse est estimée à 5 km/h.
Dans tous les cas, la détérioration de la situation financière de la compagnie était prévisible (voir encadré). Dès les premières années de la mise en service de M’dina Bus, l’autorité délégante et la compagnie se renvoyaient la patate chaude. La revue triennale, qui doit permettre de revoir les conditions du contrat délégué et les engagements pris avec la ville, n’a pas eu lieu depuis 2009. Programmée en 2014, elle aurait été reportée à 2015.
Un déficit de 120 millions de DH par an
Au fil des ans, le délégataire s’est transformé en gouffre financier. La société enregistre chaque année un déficit structurel de 100 à 120 millions de DH. Une situation qui perdure malgré les subventions de l’autorité délégante qui ont atteint les 510 millions de DH. «Ces dernières ont été versées sur 2 ou trois fois, mais jamais à M’dina Bus directement», soutient le délégataire. Une bonne partie a été notamment utilisée pour l’achat de 118 nouveaux véhicules en 2011. D’autres montants ont aussi servi pour la préparation de l’intermodalité tram/bus. Un chantier qui piétine depuis des années. Alors que le délégataire se dit techniquement prêt pour l’intermodalité depuis fin 2013, rien n’est fait concrètement jusqu’ici.
Libération
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