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Sous le règne de Mohammed VI, le champ religieux a été remanié en profondeur pour prévenir les dérives extrémistes. Depuis peu, le royaume en a aussi fait un levier diplomatique.

Au lendemain des attentats meurtriers qui frappèrent Casablanca, le 16 mai 2003, faisant 45 morts, le royaume se réveille avec une “gueule de bois” sécuritaire. Depuis quinze ans, la violence intégriste utilisée par des groupes islamistes contre la société algérienne faisait craindre le pire.

Mais le Maroc et ses élites voulaient croire que la commanderie des croyants suffirait à prévenir la contagion. Le choc du 16 mai a accéléré la restructuration du champ religieux.

 

 Un Ministre soufi

 

Nommé à la tête du ministère des Affaires islamiques en 2002, dans le gouvernement dit technocrate de Driss Jettou, Ahmed Toufiq accompagnera la réponse de Rabat au 16 mai 2003 .

Son profil prend le contre-pied parfait de son prédécesseur. Abelkébir Alaoui Mdaghri était un rigoriste assumé, Toufiq est un soufi, adepte et ancien moqaddem de la Tariqa Boutchichiya. De plus, c’est un intellectuel, professeur d’histoire et auteur de romans salués par la critique. Ce qui fait dire à Mohammed Tozy que Taoufiq "symbolise l'idéal-type du musulman berbère maghrébin tel que l'avait évoqué Jacques Berque". 

 

Le malékisme sancutarisé

 

Dans son discours du Trône du 30 juillet 2013, qui, dès lors, tient lieu de première formulation de sa doctrine religieuse, le roi revendique fermement un islam marocain: "Nos anêtres ont édifié une civilisation islamique et un état indépendatn du califat du Machrek, se distinguant par son attachement à la commanderie unique des croyants, par son ouverture en matière de culte et par l'exclusivité du rite malékite". Lequel rite se caractérise par “sa souplesse (...) et aussi par son ouverture sur la réalité”. Et de conclure: “Nous ne tolérerons pas (...) d’importer des rites cultuels étrangers (...) incompatibles avec l’identité marocaine spécifique.”

 

Sus aux fatwas sauvages

 

Pour résister à l’invasion de fatwas satellitaires venues du Golfe et popularisant un salafisme strict, le gouvernement pense à créer une radio “Mohammed VI du Saint Coran”. Elle multiplie aujourd’hui les succès d’audience. Selon les dernières mesures de radiométrie réalisées par Ipsos pour le compte du CIRAD (période avril-juin 2014), la station réalise la meilleure part d'audience, tant en semaine (17,78%), que dans le week-end (16,25%). 

Radio Coran se classe première quelle que soit la tranche d’âge. Dans la même foulée, a été créée Assadissa, une chaîne de la Société nationale de radiodiffusion et de télévision (SNRT, publique). Elle diffuse le Coran lu selon la version marocaine (Warch) et propose aussi des émissions sur le dogme officiel (malékisme-achaarisme-soufisme).

 

Oulémas, des fonctionnaires religieux

 

 

En tant qu’Etat moderne et bureaucratisé issu de la décolonisation, le Maroc n’a pas rompu avec une légitimation de la politique par le religieux. Ces deux champs s’interpénètrent, et pas seulement par la qualité de Commandeur des croyants, revendiquée par le chef de l’Etat.

Après l'avoir longtemps contestée, une part importante de la mouvance islamiste a fini par la reconnaître: PJD aujourd’hui au pouvoir, théologiens réinstallés au sein d’un Conseil supérieur des oulémas, prédicateurs salafistes ayant choisi le légalisme, confréries soufies, etc. Mais le plus spectaculaire demeure la fonctionnarisation des oulémas, qui sont de moins en mois une source de contestation.

Le champ des oulémas est par ailleurs divisé avec la réactivation de la Rabita mohammadia des oulémas , dont le secrétaire général est Ahmed Abbadi. Depuis Hassan II, l’Etat a fait de la gestion du culte une prérogative bureaucratique, avec le ministère des Habous au centre du dispositif.

 

Exporter le modèle marocain

 

Le royaume ne se contente pas de “sécurité spirituelle” en interne, il se positionne aussi en modèle de tolérance et partage son expérience avec d’autres pays sunnites. A l’automne 2013, le Maroc a commencé à former 200 imams maliens (sur un total projeté de 500), suite à la demande exprimée par le président Ibrahim Boubacar Keita.

Par la suite, le Maroc a annoncé d’autres mesures de diplomatie religieuse: en Guinée (formation d’imams), mais aussi en Tunisie (formations d’imams, construction de mosquées) et en Libye (gestion de la chose religieuse). Le Maroc a reçu des demandes émanant de Côte d’Ivoire, du Niger, du Gabon, des Maldives.

Pour le chercheur Ismaïl Régragui, auteur d’un livre sur le sujet , le royaume ambitionne de former ainsi des “diplomates religieux, qui sont autant de passerelles avec les populations” de ces pays.

 

Source : Al Huffington Post Maghreb-Maroc

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